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dimanche 6 février 2011

La couleur des sentiments

Auteur :  Kathryn Stockett 
Éditions : Jacqueline Chambon (2010)
Nombre de pages : 525 pages

Résumé : Chez les Blancs de Jackson, Mississippi, ce sont les Noires qui font le ménage, la cuisine, et qui s'occupent des enfants. On est en 1962, les lois raciales font autorité. En quarante ans de service, Aibileen a appris à tenir sa langue. L'insolente Minny, sa meilleure amie, vient tout juste de se faire renvoyer. Si les choses s'enveniment, elle devra chercher du travail dans une autre ville. Peut-être même s'exiler dans un autre Etat, comme Constantine, qu'on n'a plus revue ici depuis que, pour des raisons inavouables, les Phelan l'ont congédiée.

Mais Skeeter, la fille des Phelan, n'est pas comme les autres. De retour à Jackson au terme de ses études, elle s'acharne à découvrir pourquoi Constantine, qui l'a élevée avec amour pendant vingt-deux ans, est partie sans même lui laisser un mot.

Une jeune bourgeoise blanche et deux bonnes noires. Personne ne croirait à leur amitié ; moins encore la toléreraient. Pourtant, poussées par une sourde envie de changer les choses, malgré la peur, elles vont unir leurs destins, et en grand secret écrire une histoire bouleversante.

Passionnant, drôle, émouvant, La Couleur des sentiments a conquis l'Amérique avec ses personnages inoubliables. Vendu à plus de deux millions d'exemplaires, ce premier roman, véritable phénomène culturel outre-Atlantique, est un pur bonheur de lecture.

Mon avis

Je ressens la légère panne qui suit souvent la conclusion d'un excellent roman.  Je suis encore tellement habitée par les personnages et les mots de La couleur des sentiments, que tout ce que je commence à lire depuis me semble fade en comparaison. 

Nous avons tous entendu parler de la ségrégation entre Noirs et Blancs qui a régné jusque dans les années 1960 dans les états  du Sud des États-Unis.  Mais à moi, il m'a semblé que ce qui était raconté dans La couleur des sentiments était parmi le pire de tout ce que j'avais lu à ce sujet.  Non pas parce que c'est frappant ou spectaculaire, mais bien parce qu'il s'agit de racisme ordinaire, insinueux et rampant, de cette séparation qui semblait si naturelle, dans l'ordre des choses. 

La couleur des sentiments raconte la vie (fictive) de femmes noires qui travaillaient comme domestique dans des familles blanches, au début des années 1960 dans la ville de Jackson, Mississipi, aux États-Unis.  Skeeter, une Blanche de bonne famille, touchée par leur situation, décide d'écrire un livre sur ce sujet délicat et tabou.  Au début, il n'y a qu'Aibilene et Minny qui acceptent de parler.  Il est difficile de recruter d'autres bonnes parce qu'elles ont peur des représailles. 

Mais motivées par le désir de changer les choses et malgré les risques, elles vont témoigner.  Elles vont raconter leur quotidien à l'emploi de ces familles blanches.  Alors que l'esclavage y est officiellement aboli depuis presque cent ans, les bonnes noires sont toujours exploitées, traitées comme des esclaves par leurs patronnes blanches.  Celles-ci ont encore «droit de vie et de mort» sur leurs domestiques : si elles les renvoient, elles les privent leurs familles et elles de leur gagne-pain, les réduisant à la misère.  Cependant, il n'y a pas que des histoires d'horreur qui sont racontées.  Les bonnes noires font plus que les tâches ménagères dans ces familles : elles élèvent les enfants, elles font partie de la famille, elles partagent leur vie et connaissent tous leurs secrets.  Entre les bonnes et les familles, il peut y avoir de l'affection, de l'attachement et même de l'amour.

Aibilene, Minny et Skeeter  sont trois femmes attachantes et possèdent chacune une "voix" unique.  Aibilene, avec sa sagesse acquise tout au long de ses années de travail comme bonne, s'attache aux enfants dont elle s'occupe comme s'ils étaient les siens.  Minny, avec sa grande gueule, ne peut s'empêcher de dire ce qu'elle pense à tout le monde, peu importe les conséquences.  Et Skeeter, plus grande que les autres filles et qui rêve de devenir écrivain.  Alors que tout les sépare, ce projet d'écriture va les réunir et elles en sortiront transformées.

La grande force de l'auteure est de rendre ces personnages tellement vivants et inoubliables qu'on a l'impression d'être assis avec elles à cette table et de les écouter raconter leur vie, de partager leurs joies et leurs peines.  On ne peut qu'être révolté par le triste sort de certaines de ces bonnes et ému par certaines de ces belles histoires.  On s'aperçoit que les Blanches étaient elles aussi prisonnières de ces conventions sociales. 

En épilogue, l'auteure dit qu'il a été difficile d'écrire sur le sujet et de trouver un juste équilibre entre l'ombre et la lumière dans ces relations interraciales.  Je trouve qu'elle a inventé une histoire touchante et intéressante du point de vue humain et qu'elle a su trouver le ton juste pour le faire.  La couleur des sentiments réchauffe le coeur et fait naître l'espoir.  Je ne peux que vous le recommander chaudement, car il s'agit de mon premier coup de coeur de l'année!

Citations : «N'était-ce pas le sujet du livre ? Amener les femmes à comprendre.  Nous sommes simplement deux personnes.  Il n'y a pas tant de choses qui nous séparent.  Pas autant que je l'aurais cru.» (P. 489)

Dans l'épilogue : «Tout comme pour le Mississippi, j'éprouve pour La Couleur des sentiments des sentiments contradictoires.  Concernant les limites entre Noires et Blanches, je crains d'en avoir trop dit.  On m'a appris à ne pas parler d'une chose aussi embarrassante parce que c'était vulgaire, impoli, et qu'elles risquaient de nous entendre.

Je crains de ne pas en avoir assez dit.  De ne pas avoir assez dit que non seulement la vie était beaucoup plus dure pour nombre de femmes travaillant chez les Blancs dans le Mississippi,  mais aussi qu'il y avait infiniment plus d'amour entre les familles blanches et les domestiques noires que je n'avais d'encre ou de temps pour le décrire.» (P. 525-526)

Les avis de Joelle et Sophie pour qui ce fut aussi un coup de coeur.

Source couverture : Renaud-Bray

5 commentaires:

Suzanne a dit…

J'ai telleemnt hâte de le lire celui-là!

Sophie a dit…

Ton billet n'arrange pas mes affaires Opaline. Je l'ai repéré depuis un moment et le fait que ce soit un coup de coeur pour toi laisse supposer que je vais adorer moi aussi !

Joelle a dit…

Toi aussi, tu trouves dur de passer à autre chose après cette lecture !!! C'est que c'est une histoire émouvante et des personnages forts qu'on suit pendant toutes ces pages ;) En tout cas, contente de voir que ça t'a plu !!!

Opaline a dit…

Allez-y fort, mes chères, allez-y fort! Une vraie histoire pour le coeur!

Lizzie a dit…

il est dans ma "PAL" je le lirai bientôt, ta critique attise ma curiosité ...
J'aime beaucoup ta phrase : "Je ressens la légère panne qui suit souvent la conclusion d'un excellent roman.", c'est un peu ce qui m'arrive après l'Apothicaire mais ça va passer ...